Présentation de la copie de l’épée celtibère
Présentation de l’épée celtibère (fin du IIe s. av. J.-C.) du Pla de Molàs (Le Boulou)
Petite leçon de terminologie sur Gaulois et Ibères
Au Ve s. av. J.-C., les Grecs parlaient des Celtes quand les Romains les nommaient Gaulois. On peut donc parler de Gaule celtique pour désigner les territoires de la France actuelle et ses franges nord qui étaient peuplés de tribus d’origine celte.
Dans le sud de la France actuelle et ses franges vivaient des tribus non-celtes : Ligures en Provence et Ligurie, Ibères au sud de l’Hérault et en Ibérie.
En fait, la Gaule, la Gallia des Romains, plus ou moins assimilée au territoire de l’actuelle France, n’était pas peuplée que de Gaulois Celtes mais aussi d’Ibères et de Ligures ; de même, l’Ibérie ou Hispania des Romains était peuplée d’Ibères dans sa partie orientale, de Celtes dans sa partie occidentale, et au sud de Tartessos (descendants de peuples indigènes) et de Carthaginois (d’origine phénicienne).
Sous domination romaine, l’Ibérie devint Hispania dès 197 av. J.-C., le sud de la France Gallia Transalpina dès 120 av. J.-C. et le reste de la Gaule, la Gaule celtique ou « Gaule chevelue » Celtica en 52 av. J.-C. tandis que la partie des Pyrénées centrales, atlantique et l’Aquitaine était dénommée Aquitania (pour souligner le caractère particulier de sa population pré-basque).
Si la Celtique n’était bien peuplée que de tribus celtes, la « Gaule Narbonnaise » (nouveau nom adopté pour la Gaule Transalpine par Auguste) était donc habitée à la fois par des tribus ligures, celtes et ibères mais aussi des Grecs dépendant de la colonie de Marseille. Au cours des temps, ces tribus se mêlèrent échangeant leurs influences sur diverses formes de leurs civilisations (pratiques culinaires, langues, techniques de construction, techniques métallurgiques, etc.). On peut donc parler de peuples celtibères pour désigner généralement les tribus d’origine ibère celtisées.
Georges CASTELLVI
- Examen de l’épée découverte en 2007
sur le site du Pla de Molàs (Le Boulou)
La découverte. L’épée dans son fourreau a été découverte en 2007 par l’équipe des archéologues de l’Inrap dirigée par Jérôme Kotarba, à l’occasion des travaux routiers de la déviation de la RD 618 (commandés par le CD 66) à hauteur des Chartreuses du Boulou, au lieu-dit Pla de Molàs.
Dans l’un des surcreusements d’une grande fosse remplie de rejets domestiques (amphores à vin italiques, restes de repas), a été trouvée une grande épée en fer dans son fourreau, associée à une boucle de ceinture et des anneaux de suspension en bronze, vestiges métalliques d’un baudrier de cuir disparu. Il s’agissait là d’un dépôt volontaire qui contrastait avec l’aspect désorganisé des rejets domestiques qui la recouvrait.
L’épée a été étudiée par Stéphanie Raux de l’Inrap. Elle mesure 1,02 m hors poignée, non conservée. C’est une épée de taille, arme de cavalier, qui apparaît à La Tène finale au IIe s. av. J.-C. Elle est caractérisée par deux tranchants parallèles, une absence de nervure centrale et une extrémité arrondie. Ce type d’épée est connu tant dans le monde celtique continental que dans le monde celtibère qui l’utilise aussi en concurrence avec le gladius hispaniensis, glaive à lame courte et pointue.
Le fourreau est prolongé d’une bouterolle longue avec frettes. Ce type est aussi caractéristique de La Tène finale.
Le système de suspension avait conservé deux anneaux de bronze liés à un passant disparu, ainsi qu’une boucle de ceinture.
Le fourreau était donc tenu par un système de baudrier, de courroies et de ceinture.
L’épée et le fourreau peuvent être datés des années 150-120 av. J.-C. mais l’agrafe, plus récente, ramènerait le dépôt aux environs de 100 av. J.-C.
Dans les secteurs voisins ont été mis au jour des fragments d’armes de jet (dont un pilum et des talons de lances) qui pourraient attester un combat dont l’enfouissement de l’épée pourrait constituer un rappel commémoratif.
D’après Jérôme KOTARBA et Stéphanie RAUX / Inrap